Rapports spéciaux du GIEC

Le GIEC, groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, créé en 1988 par l’ONU et l’organisation météorologique mondiale est composé de milliers de scientifiques et d’experts du monde entier. Ces derniers oeuvrent bénévolement à l’étude d’articles validés par la communauté scientifique.

Pour autant, ce regroupement d’experts ne fais pas l’unanimité et, en 2009, l’organisation a été accusée d’exagérer intentionnellement le réchauffement climatique, c’est ce l’on a nommé le climategate.

Tous les 5 à 7 ans, cette organisation produit un rapport d’évaluation qui résume les découvertes scientifiques autour du réchauffement climatique.
Le rapport de 2007 établi formellement que le changement climatique est indéniable et imputable à l’activité humaine.

Le GIEC produit également des rapports spéciaux, thématisés sur des problématiques spécifiques.
Nous nous intéresserons ici à 3 s’entre eux : Réchauffement planétaire de 1,5°C (2018), Changement climatique et terres émergées (2019), ainsi qu’à L’océan et la cryosphère dans le contexte du changement climatique (2019).
Ce dernier a participé à la prise de conscience des populations ainsi qu’aux premières mobilisations citoyennes pour le climat.

Introduction

L’essentiel du contenu des trois rapports spéciaux du 6ème cycle d’évaluation du changement climatique peut être résumé en 5 items principaux :
– Le climat change partout et les ses effets sont déjà observables
– Les gaz à effet de serre en sont les principaux responsables
– A court terme, il est possible de réduire les tendances engagées
– A long terme, il ne tient qu’à l’humanité de réduire ses émissions à effets de serre pour éviter d’aller dans le mur
– Enfin, de nombreuses options d’actions existent et peuvent plus ou moins limiter les conséquences de réchauffement climatique

Réchauffement planétaire de 1,5°C (2018)

Ce rapport permet une projection des conséquences qu’impliqueraient un réchauffement de 1,5°C à 2°C.
Parmi les éléments essentiels, il faut retenir qu’il n’y a que 5°C globaux qui nous séparent de la précédente ère glaciaire.
Un réchauffement de quelques demi-degrés implique une multiplication des événements climatiques chaud (sécheresse, canicule, incendies, etc.) et un adoucissement des températures des saisons froides. En somme, les hivers seront de moins en moins froids, ce qui est déjà observable depuis plusieurs dizaines d’années, et les étés seront de plus en plus chaud.
Les pluies seront plus intense sous les climats humides et plus rares sous les climats secs.
Ces évolutions vont impacter profondément les écosystèmes, le rendement agricole voire l’habitabilité d’espaces actuellement peuplés qui deviendront trop chaud et trop humides pour y rester.

Quelles différences entre 1,5°C et 2°C ?

Les risques sont disproportionnellement plus élevés pour l’Arctique, les zones arides (dont celles de climat méditerranéen), les pays insulaires et les pays les moins avancés.
On peut s’attendre à plusieurs millions de personnes exposées aux risques climatiques directs et indirectes et susceptible de basculer dans la pauvreté, dans le cas d’un scénario à 2°C plutôt 1,5°C.

Pour autant, il existe ne nombreux leviers d’actions pour limiter les risques liés au climat. Cependant, il existe aussi des limites à l’adaptation et aux capacités humaines.
Il n’est pas possible pour le GIEC d’évaluer les coûts de transformation de nos sociétés, mais il s’agirait un rythme jamais vu jusqu’à aujourd’hui.

Changement climatique et terres émergées (2019)

Le second rapport spécial, permet de mettre en lumière les enjeux sociétaux et climatiques autour d’une ressource critique, indispensable à l’ensemble de la population humaine.
Cependant, une gestion durable des terres est possible dès maintenant et fait partie des solutions envisageables. Pour autant ce secteur ne peut pas soutenir les émissions des autres secteurs d’activité.

L’humanité utilise 70% des terres non-glacées, un quart d’entre elles sont déjà dégradées (notamment par désertification).
L’évolution démographique et la consommation par habitant contribue à la pression croissante sur les terres émergées. Son exploitation se caractérise également par la dégradation des écosystèmes et la perte de biodiversité.

Malgré les évolutions techniques et technologiques, le système alimentaire n’est pas soutenable dans le temps. Aujourd’hui, 820 millions de personnes souffrent de la faim alors que 2 milliards de personnes sont en surpoids ou obèses.
Le gaspillage a également sa part de responsabilité dans ces inégalités alimentaires : 25 à 30% de la production est perdue ou jetée.
Enfin, 1/3 des émissions de gaz à effet de serre provient de notre système alimentaire actuel alors que c’est un secteur critique et vulnérable au changement climatique.

Parmi les solutions existantes, nous pouvons citer :
–  l’élimination des pertes et du gaspillage alimentaire
– une transformation des modes de production, de transformation et de consommation
– Un renforcement des « puits de carbone », symbolisés par la restauration des forêts et des boisements

Il est important de prendre en compte que le réchauffement climatique est plus important au dessus des continent, ce qui implique un assèchement de certains sols où à une fonte plus prolongée des espaces arctiques et antarctiques.

Ce rapport aborde aussi les risques encourus par le réchauffement des températures, parmi eux : feux de forêts, chute des rendements, pénurie d’eau dans les régions arides.
Egalement, les niveaux de risques ne sont pas uniquement liés au réchauffement, les choix socio-économiques ont une part majeure dans ces derniers.

Dans tous les cas, il est important de varier et de démultiplier les types d’actions, l’exemple présenté est celui du boisement. Si le fait de planter des forêts, avec des essences locales et adaptées, peut effectivement permettre de restaurer des puits de carbone. Ne faire que cela sans varier localement les initiatives peut se révéler contre-productif.
Enfin, il faut agir dès maintenant, anticiper l’aggravation de la situation. Les rapports bénéfices/coûts sont toujours plus intéressants à court terme plutôt que d’attendre une situation encore moins favorable

L’océan et la cryosphère dans le contexte du changement climatique (2019)

Ce rapport mets en avant les effets de cascades et les conséquences indirectes liées à la transformation des zones arctiques, antarctiques et de haute montagne.

Pour commencer, les régions de haute montagne sont habituées par 670 millions de personnes qui dépendent du stockage de l’eau des glaciers et des précipitations pour subsister.
30 % des sols gelés se trouvent en zone de haute montagne. La fonte des glaciers représente plus ou moins 123 milliards de tonnes d’eau qui rejoignent les océans chaque année.
Parallèlement, les sols gelés augmentent régulièrement en températures depuis les années 80.

Le tourisme, l’agriculture, les infrastructures sont directement concernés par les conséquences du réchauffement et entrainent des mouvements de population. Notamment dans les régions de haute montagne en Asie.

Les projections faites mettent en avant la poursuite de la fonte des glaciers.
La stabilité des pentes, le nombre, la surface des lacs pro-glacière et leur conséquences avec les risques de vidanges abruptes de ces lacs qui peuvent entrainer des glissements de terrains ou des avalanches dans de nouvelles zones ou altitudes et à de différentes saisons peu concernées par le passé.

Quand les glaciers reculent, les rivières de remplissent. On peut observer des phénomènes d’écoulement et de ruissellement plus importants.
La fonte précoce des glaciers ne permet plus d’entretenir les cours d’eau sur de longues périodes, ce qui entrainera une augmentation des assèchements de cours d’eau dépendants des montagnes de plus en plus fréquents.

Au delà des risques encourus, c’est toute une biodiversité qui est en danger. Adaptée au climats froids, les espèces ne pourront subsister à un réchauffement rapide de leurs milieux de vie.

En ce concerne les régions polaires, elles sont déjà particulièrement affectées par le réchauffement climatique.
Notamment la région arctique, qui abrite 4 millions de personnes dépendantes des espèces animales et végétales. Ces populations sont particulièrement impactées, car nous le disions plus haut, les effets du réchauffement ne sont pas proportionnellement répartis sur le globe.

Les sols gelés sonts d’énormes réservoirs de carbone et il est aujourd’hui impossible de savoir exactement les conséquences du réchauffement des ces terres et de l’éventuelle libération du carbone emmagasiné.
Enfin, la perte de masse du Groenland et de l’Antarctique contribue à l’élévation du niveau des mers, en lien avec la dilatation de l’eau par réchauffement.

 

Halte à la croissance ? – Dennis Meadows

Le modèle World3 a été conçu pour étudier 5 tendance globales, en 1972 : l’industrialisation accélérée, la croissance démographique rapide, la malnutrition généralisée, l’épuisement des ressources non renouvelables et la détérioration de l’environnement.
L’équipe reconnaît que sont modèle, étant schématique, est nécessairement imparfait, simplifié et très probablement incomplet.
Pour autant, il permet, d’après eux, de donner des grandes tendances nécessaire à la prise de conscience et aux décisions de celles et ceux qui en ont les responsabilités.

Ce modèle introduit également la notion de « seuil de tolérance » qui défini une limite de population à ne pas dépasser, au risque de voir un décrochage généralisé explicité plus bas.

La question se pose alors sur les conséquences sur le niveau de population en cas de dépassement de ce fameux seuil. Plusieurs hypothèses sont envisagées :
La population dépasserait le seuil de tolérance puis oscillerait autour, avec ou sans dépassements réguliers.

Ou, la population exploserait le seuil, ce qui se caractériserait par une chute violente de son niveau ainsi qu’un abaissement général du seuil de tolérance.

L’équipe modélisatrice tire plusieurs conclusions de leurs simulations :
– Si les tendances de consommations de la population mondiale restaient celles de 1972, ils estimaient que les limites de croissance seraient atteintes dans le siècle à venir. En découlerait un moment de rupture où la production s’effondrerait et un déclin soudain de la population.
– D’après eux, il est possible de corriger le tir afin de retrouver des conditions de stabilité écologique et économique. Les conditions de réussite sont liées à la capacité de mobiliser le plus tôt possible, l’ensemble de la population globale et de revoir nos systèmes de production et de consommation afin de ne pas basculer.

Le modèle mathématique proposé dans « Limit to growth » relève de la dynamique des systèmes. Cette méthode permet de comprendre les comportements dynamiques des systèmes complexes, composés de boucles de rétro-actions où les différents éléments agissent directement et indirectement avec les autres. Il permet, en outre, de prendre en compte les effets secondaires de conséquences des situations modélisées.

Même si ce modèle a été mené en contradictions depuis, il a le mérite de poser les bases d’un discours à contresens du mode vie favorisé par la période des 30 glorieuses à l’aube d’une génération de baby-boomer qui émerge.
Sans se vouloir prophétique, les auteurs s’en défendent d’ailleurs, ce rapport exprime des scénarios que l’on pourrait qualifier de pessimistes : régulation de la population, ressources naturelles illimitées, captation de la pollution, même avec des hypothèses favorisants les scénarios. Un effondrement semble inévitable.

Et même si d’autres modèles d’anticipations plus récents, plus globaux, plus perfectionnés sont venu compléter les prédictions de World3.
Notamment dans L’hypothèse Gaïa – James Lovelock où les boucles de rétroactions sont également abordées.
Dont nous pourrons trouver les résumés des chapitres 5 à 8 ici : https://plateformes.didactiques.mediationsemiotiques.com/pd/?p=89

Les notions d’explosion des consommations, de pollution, de population et de production industrielle sont encore présente et nous réalisons encore aujourd’hui qu’il est trop tard pour éviter un décrochage. Les planifications actuelles sont focalisées sur la minimisation de l’emballement.

Le cas des forêts, une ressource renouvelable ?

Considéré comme renouvelables, les forêts ont toujours été exploitées pour leur faune, flore et notamment pour leur bois.
Les forêts n’ayant jamais été exploitées sont appelées « primaires » et regorgent d’essences de bois variées, rares, nécessaire aux niches de biodiversité.  Lorsque replantées et exploitées elles sont alors nommées « secondaires » et ne remplaceront pas la qualité des forêts primaires.
En ce sens, il est bon de concevoir le bois des forêts primaires comme des ressources non renouvelables.

Il est à noter que l’ensemble des forêts primaires des zones tempérées ont disparues avant la révolution industrielle alors que les forêts des zones tropicales sont actuellement en cours d’exploitation et de disparition. Ces dernières sont remplacées par des exploitations agricoles et des habitations.

Aujourd’hui la majorité des forêts primaires subsistantes se trouvent dans les zones arctiques (Amérique du nord et Russie) et tropicales (Amérique du sud).

Concernant les projections,  si le rythme des 2% de déforestation tropicale supplémentaire est maintenu, l’ensemble des forêts non protégées auront disparues à l’horizon de l’an 2054.  En maintenant le cap actuel, de 20 millions d’hectares perdus par année, les forêts non protégées auront disparues vers 2094.
En réduisant la déforestation à 1% par an, les forêts résiduelles réduiront de moitié toutes les 72 années.
Ces projections sont amenées à varier et la réalité se trouvera probablement entre ces différents scénarios, les décisions politiques, évolutions démographiques et aléas socio-économiques pèseront dans la balance.

Est abordée également la notion sensible et qualitative des forêts primaires. Difficilement quantifiables, le nombre d’espèces connues et inconnues, la biodiversité, sont autant de paramètres à prendre en compte dans les enjeux forestiers.

Enfin, il est pertinent de relever le fait que la démocratisation des outils numériques est corrélé à l’explosion de la consommation de papier par l’ensemble de l’humanité où de gros efforts sur le recyclage pourraient permettre de limiter leur impact sur les forêts.

Pour aller plus loin sur le modèle world3 et ses contradicteurs :

Modéliser l’avenir de l’humanité – Heu?reka

Il est possible d’expérimenter le modèle world3 et de faire varier soi-même les valeurs présentées en suivant le lien suivant :
https://insightmaker.com/insight/1954/The-World3-Model-Classic-World-Simulation